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#1 Le 21/02/2021, à 11:20

P'skhal
Explorateur
Lieu : Au-delà du portail
Inscription : Le 18/08/2016,
Messages : 37 384

Au-delà des licences libres ?

Bastien a écrit :
Résumé

Des acteurs des communs constatent que les quatre libertés qui sont au coeur du mouvement social proposé par la free software foundation sont des outils qui ne sont plus adaptés au combat à mener pour réaliser ce projet de société. Ils proposent de repenser le mouvement du libre pour lutter contre les « communs du capital » et s'appuient pour cela sur de nouvelles licences qui s'écartent des quatre libertés, licences qu'ils considèrent « plus libres » que les licences libres.

Ce faisant, ils inversent le rapport qui existe entre les quatre libertés et le projet de société du free software mouvement. S'il y a un projet de société derrière ce mouvement, c'est celui qui découle du respect des quatre libertés, ce projet n'est pas premier. D'ailleurs, il n'y a pas un unique « projet » de société derrière la révolution des quatre libertés en informatique : il y a celui d'ESR, celui de RMS et celui d'autres encore. Le libre et l'open source permettent cette variété de projets et ne s'accordent que sur un principe commun : les utilisateurs de programmes informatiques ne doivent jamais avoir leurs libertés limitées par la volonté des propriétaires d'un code source.

(Ne nous trompons pas sur les nouveaux risques d'enclosure : si des entreprises participent de plus en plus à la gouvernance et à la production de logiciels libres, cela ne rend pas ces codes sources moins libres. Cela rend l'informatique libre plus dépendante des intentions de ces acteurs, mais les codes sources restent bien des ressources informationnelles librement réutilisables.)

Ces acteurs des communs sont en droit de s'estimer mieux intentionnés que ces entreprises, et plus proches des idéaux du projet de société de la free software foundation auquel ils adhèrent, mais ont-ils pour autant raison de vouloir modifier le « coeur du réacteur » du free software mouvement en y plaçant de nouvelles licences ? Je crois que non.

D'une part, il me semble que cette démarche repose sur une forme de solutionisme juridique : « Changer les licences donnera la bonne direction à ce mouvement du libre devenu très puissant en l'adaptant aux nouvelles enclosures. » Je vois là une illusion issue d'une exagération du rôle joué par les licences libres comme hack juridique. Ce ne sont pas les juristes qui ont écrit le système GNU/Linux, ce sont les hackers. Proposer de nouvelles licences ne permettra pas de faire l'économie des façons de lutter contre l'hégémonie d'entreprises aux valeurs douteuses. C'est la forces des initiatives concurrentes qui engagera la lutte, que ces initiatives s'appuient ou non sur des licences libres.

D'autre part, choisissant cette direction, les acteurs des communs légitiment la démarche de ceux qui s'estiment aussi bien intentionnés qu'eux et qui ne respectent pas les quatre libertés. Cela peut être au nom de la préservation du modèle économique d'un éditeur (dans le cas de la Server Side Public License), de limitations éthiques imposées au utilisateurs (dans le cas des licences éthiques), des contraintes reposant sur le statut des utilisateurs (dans le cas de la Coopyleft ou de la Peer Production License) ou sur l'obligation de contribuer en retour (pour la Commons Reciprocity License) : il y a maintes bonnes raisons de vouloir réintroduire de l'asymétrie entre les droits des producteurs de logiciels et ceux des utilisateurs.

La suite du billet : bzg


“ Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain „

P'skhal

#1 Le 21/02/2021, à 11:20

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Bastien a écrit :
Résumé

Des acteurs des communs constatent que les quatre libertés qui sont au coeur du mouvement social proposé par la free software foundation sont des outils qui ne sont plus adaptés au combat à mener pour réaliser ce projet de société. Ils proposent de repenser le mouvement du libre pour lutter contre les « communs du capital » et s'appuient pour cela sur de nouvelles licences qui s'écartent des quatre libertés, licences qu'ils considèrent « plus libres » que les licences libres.

Ce faisant, ils inversent le rapport qui existe entre les quatre libertés et le projet de société du free software mouvement. S'il y a un projet de société derrière ce mouvement, c'est celui qui découle du respect des quatre libertés, ce projet n'est pas premier. D'ailleurs, il n'y a pas un unique « projet » de société derrière la révolution des quatre libertés en informatique : il y a celui d'ESR, celui de RMS et celui d'autres encore. Le libre et l'open source permettent cette variété de projets et ne s'accordent que sur un principe commun : les utilisateurs de programmes informatiques ne doivent jamais avoir leurs libertés limitées par la volonté des propriétaires d'un code source.

(Ne nous trompons pas sur les nouveaux risques d'enclosure : si des entreprises participent de plus en plus à la gouvernance et à la production de logiciels libres, cela ne rend pas ces codes sources moins libres. Cela rend l'informatique libre plus dépendante des intentions de ces acteurs, mais les codes sources restent bien des ressources informationnelles librement réutilisables.)

Ces acteurs des communs sont en droit de s'estimer mieux intentionnés que ces entreprises, et plus proches des idéaux du projet de société de la free software foundation auquel ils adhèrent, mais ont-ils pour autant raison de vouloir modifier le « coeur du réacteur » du free software mouvement en y plaçant de nouvelles licences ? Je crois que non.

D'une part, il me semble que cette démarche repose sur une forme de solutionisme juridique : « Changer les licences donnera la bonne direction à ce mouvement du libre devenu très puissant en l'adaptant aux nouvelles enclosures. » Je vois là une illusion issue d'une exagération du rôle joué par les licences libres comme hack juridique. Ce ne sont pas les juristes qui ont écrit le système GNU/Linux, ce sont les hackers. Proposer de nouvelles licences ne permettra pas de faire l'économie des façons de lutter contre l'hégémonie d'entreprises aux valeurs douteuses. C'est la forces des initiatives concurrentes qui engagera la lutte, que ces initiatives s'appuient ou non sur des licences libres.

D'autre part, choisissant cette direction, les acteurs des communs légitiment la démarche de ceux qui s'estiment aussi bien intentionnés qu'eux et qui ne respectent pas les quatre libertés. Cela peut être au nom de la préservation du modèle économique d'un éditeur (dans le cas de la Server Side Public License), de limitations éthiques imposées au utilisateurs (dans le cas des licences éthiques), des contraintes reposant sur le statut des utilisateurs (dans le cas de la Coopyleft ou de la Peer Production License) ou sur l'obligation de contribuer en retour (pour la Commons Reciprocity License) : il y a maintes bonnes raisons de vouloir réintroduire de l'asymétrie entre les droits des producteurs de logiciels et ceux des utilisateurs.

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